Négociations salariales : le ministre pousse au conflit !
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Suite à la forte mobilisation des personnels de la fonction publique le 20 novembre, le Ministre de la Fonction publique avait annoncé, lors d’une « rencontre salariale » avec les organisations syndicales que le 17 décembre serait la première étape d’une négociation. Pour la première fois et après des mois de dénégation, Eric Woerth acceptait de prononcer le mot de négociation et reconnaissait que le point d’indice et la reconstruction de la grille indiciaire étaient des éléments incontournables de discussion. Mais les propos tenus devant les médias le 16 au soir fichaient tout par terre, puisqu’il n’était plus question de mesure générale.
Provocations et mépris !
Le 17, d’entrée de jeu, le ton a été donné par le ministre de la Fonction publique, empreint comme à son habitude des discours du président de la république : « si les fonctionnaires veulent gagner plus, qu’ils travaillent plus ».
C’est surtout en tant que ministre du budget qu’il a répondu aux attentes des agents : « budgétairement, j’ai provisionné les coûts des changements d’échelons, des promotions, des heures supplémentaires, et quelques mesures catégorielles. » Pour Solidaires la traduction était simple : le budget est bouclé dans le sens des propositions officielles !
Si, contraint et forcé par une étude de l’INSEE, le Ministre reconnaissait enfin que la baisse du pouvoir d’achat existait dans la fonction publique, il concluait que cela concernait uniquement 17% des personnels. Hors cette étude statistique comprend des données, des bases contestables et ne
concerne que les Fonctionnaires d’Etat.
Pour Solidaires, c’est travestir la réalité et nier que les fonctionnaires ont
perdu depuis 2000 près de 7% de leur pouvoir d’achat. Pourtant le calcul
de cette simple vérité devrait être chose aisée pour un ministre du
budget : 13,3 % d’augmentation des prix, 6,6 % d’augmentation du
traitement indiciaire des fonctionnaires …le résultat est négatif, Monsieur
le Ministre !
Des propositions intolérables…
« En tenant compte du fait que le traitement indiciaire (80% de la rémunération totale) couvre l’inflation (sauf pour 17 % d’agents), et que les effets des progressions à l’ancienneté (Vieillesse : changement d’échelon) et des promotions (Technicité) font partie du maintien du pouvoir d’achat, il est impensable de majorer la valeur du point d’indice » telle a été la conclusion du ministre.
Mais cependant, s’adressant aux représentants des personnels, il a proposé deux scénarios :
Un système novateur (que l’on peut regarder si vous voulez, dit-il !) : majorer la valeur du point d’indice au titre d’une mesure générale...mais en contrepartie ralentir la progression indiciaire (donc le passage d’échelons et les promotions). Ce système « novateur » de majoration de la valeur du point d’indice en contrepartie d’un ralentissement de la progression du nombre de points d’indice, remettrait en cause le principe même de l’organisation et du déroulement de la carrière qui assure, entre autres, une progression automatique d’un échelon à un autre. En faisant une telle proposition, il a aussi remis en cause la durée de séjour dans les échelons qui se traduirait par un allongement de la durée de
chaque grade et donc de la carrière.
Instituer un système de garantie individuelle (au cas par cas) de maintien du pouvoir d’achat par le versement d’une indemnité compensatrice qui entrerait dans le champ de la retraite additionnelle (RAFP). Pour la première fois dans l’histoire des négociations salariales de la fonction publique, un gouvernement propose des mesures à caractère individuel et non plus collectives. C’est encore là une attaque au principe d’égalité de traitement dans la fonction publique ! Concrètement, une « prime » serait versée (forcément l’année N+1) à tout agent ayant perdu du pouvoir d’achat par rapport à l’inflation. Il faudrait donc pour tous les fonctionnaires regarder leur situation individuelle. Il faudrait regarder la situation des non-titulaires que le Ministre a à peine évoquée. Cette tache gigantesque (assurée par quel personnel ?) devrait tenir compte du budget de la fonction publique
hospitalière et de la multitude des employeurs territoriaux. Impossible !
En fait, la volonté du gouvernement est d’individualiser le traitement pour pouvoir arriver à des rémunérations de gré à gré et pour pouvoir casser le déroulement de carrière et les règles collectives de gestion des personnels.
...dans la logique de la casse de la Fonction publique !
Si le ministre considère que les organisations syndicales de la fonction publique qui refusent ses propositions sont « archaïques », c’est qu’il oublie que la construction de la Fonction Publique est le fruit d’une longue évolution historique faite pour assurer la continuité du service, l’égalité de traitement des citoyens et l’indépendance de l’agent public à l’égard du pouvoir politique. Le statut c’est tout cela et c’est ce statut que le gouvernement, dans la ligne du discours de Nicolas Sarkozy, veut faire exploser.
Les annonces du 12 décembre sur la politique de « modernisation des politiques publiques » vont dans ce sens et elles ont été confirmées le 18 au cours du Conseil Supérieur. Sous prétexte de simplifications administratives, ce sont des milliers d’emplois et de services publics de proximité qui vont disparaître. Pour les personnels ce sera plus de précarité, des conditions de travail dégradées et des règles de gestion et des garanties collectives explosées. Pour les usagers, ce sera plus d’attente, d’éloignement et de complications.
Pour l’Union syndicale Solidaires, il s’agit de construire les conditions
nécessaires dune mobilisation pour l’amélioration de la fiche de paye des
fonctionnaires et des non-titulaires de droit public comme de droit privé.
L’Union syndicale Solidaires appelle les personnels de la Fonction
publique à se mobiliser le 24 janvier prochain pour que le gouvernement
entende enfin leurs revendications.